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La France dans la guerre d’Indépendance américaine (CHAPITRE I) : histoire d’une intervention (plus que) décisive

La guerre d’Indépendance américaine est certainement le conflit armé de la fin du XVIIIe siècle ayant eu le plus d’influence sur l’histoire du Monde. Cette guerre, qui opposa d’avril 1775 à novembre 1782 les treize colonies anglaises d’Amérique du Nord à l’Angleterre, aboutit à la création de ce qui deviendra un siècle plus tard la première puissance économique et industrielle du monde, fut l’un des événements déclencheurs de la Révolution Française, et participera de l’établissement de ce nouvel ordre mondial qui se dessine en cette fin de XVIIIe siècle. Cette guerre américaine sera en effet, une fois n’est pas coutume, le théâtre d’un affrontement d’envergure (d’abord indirect, puis direct) entre la France et l’Angleterre, nos deux éternels rivaux qui constituent alors les deux plus grandes puissances mondiales, et luttent sans fin pour l’hégémonie du monde occidental.

Pour les intéressé(e)s également : ma série d’articles sur la guerre de Sept Ans, cette première « guerre mondiale » de l’Histoire déterminante de la marche du monde, et en forme de grand désastre pour la France.

Cette guerre, où France et Angleterre vont ainsi à nouveau croiser le fer par ennemi/allié interposé, s’inscrit dans le prolongement direct de la guerre de Sept Ans (1756-1763), cette première « guerre mondiale » de l’Histoire, qui a vu notamment la France perdre et céder à l’Angleterre le cœur de sa colonie d’Amérique du Nord – le Canada français (une histoire que j’ai eu l’occasion de raconter dans cette autre série d’articles, et que je vous invite à découvrir en amont par souci de chronologie et de meilleure compréhension… !).

À lire aussi avant de préférence ! 😉

La première puissance continentale d’Europe reste ainsi traumatisée de cette guerre qui lui a coûté la quasi-intégralité de son premier empire colonial (Amériques, Indes,…), et ne rêve que de revanche. Une revanche à laquelle elle s’est méthodiquement préparée, et dont l’opportunité lui est justement donnée une belle année de 1775, à l’occasion du soulèvement des colonies anglaises d’Amérique du Nord. Colonies qui, écrasées par les taxes que la Couronne britannique leur administre (et dont a grand besoin l’Angleterre pour renflouer les crédits engagés par huit années de guerre totale), entrent en rébellion, réclament (et même proclament) leur indépendance, et appellent à l’aide les grandes puissances européennes.

Le soutien français aux « insurgés » nord-américains sera d’abord logistique et matériel, par des prêts et l’envoi secret d’armes, d’uniformes, de vivres, de soldats et surtout d’officiers chargés de former et d’assister la jeune et bien peu expérimentée armée rebelle (des livraisons d’ailleurs aussi peu officielles que rapidement détectées par les Britanniques…). Nullement désintéressée, cette aide matérielle de la France aux colons indépendantistes ne manque d’ailleurs pas d’une de ces lourdes ironies de l’Histoire, la première n’étant pas sans oublier la présence dans les rangs américains des mêmes miliciens qui avaient, une à deux décennies plus tôt, combattu avec et au sein de l’armée anglaise durant son invasion et conquête du Canada français. Mais on ne manque pas une si belle occasion de déstabiliser et d’affaiblir son grand rival, et même l’on persiste et signe.. !

En 1778, après deux années d’aide officieuse, la France signe un grand traité d’alliance avec les jeunes « Etats-Unis d’Amérique », et entre ainsi, pour la énième fois de l’Histoire, officiellement en guerre contre l’Angleterre. De partiel et timide, l’engagement devient total et assumé : un corps expéditionnaire (dont les volontaires sont menés par le célèbre marquis de Lafayette) vient combattre aux côtés des rebelles américains, et toute la flotte de guerre française est mobilisée. Nerf de la guerre, le budget de la Marine explose (des deux côtés de la Manche), et creuse un endettement parmi les racines de la future Révolution de 1789. Bien que terriblement coûteuse et peu ou prou sans aucuns bénéfices monétaires ou extraterritoriaux, l’aide française terrestre et surtout navale s’avère décisive, et même déterminante sur le cours de la guerre, qu’elle infléchit : elle est l’artisane de la victoire de Yorktown de 1781, qui rouvre les négociations et débouche sur l’indépendance américaine.

Les Treize colonies et l'Amérique du Nord à la veille de la guerre d'Indépendance américaine (carte de situation suite à la guerre de Sept Ans et au traité de Paris de 1763)
Carte de situation des « Treize colonies » et des autres colonies d’Amérique du Nord à la veille de la guerre d’Indépendance américaine (avec en rose : les provinces britanniques de Québec et de la Floride (récupérée aux Espagnols suite à la guerre de Sept Ans) ; en blanc : le reste du Canada et la région des Grands Lacs ; en noir : les territoires protégés réservés aux Amérindiens ; et enfin en orange : la Louisiane française (ou ce qu’il en reste à l’ouest du Mississippi – le reste étant passé sous contrôle britannique depuis 1763))

La France n’a pas ainsi seulement symboliquement aidé, mais concrètement permis la naissance des Etats-Unis d’Amérique. Un engagement animé par les intérêts géopolitiques et le désir de revanche (né de la débâcle de la guerre de Sept Ans), qui créera un lien tout particulier entre ces deux pays et populations malgré leurs affrontements passés, et qui comptera également parmi les périodes les plus glorieuses de la Marine française, qui s’illustrera comme rarement dans son histoire en tenant tête victorieusement sur la durée à la si redoutée et redoutable Royal Navy, dans le contrôle du vaste et stratégique terrain de jeu atlantique.

Un engagement qui coûtera cher à la France, mais qui fera l’Histoire : celle des Etats-Unis, de l’Angleterre, de la France – et même plus globalement de l’Europe et du monde par ses conséquences à court et moyen-long terme, comme je vous propose de le découvrir dans cette nouvelle série d’article. Bonne lecture !


Destins croisés dans la baie de Chesapeake

5 septembre 1781, à bord du Ville de Paris, quelque part sur la côte de l’actuel état de Virginie. François Joseph Paul De Grasse, lieutenant-général des armées navales françaises, contemple depuis la poupe de son navire amiral les débris flottants qui parsèment l’embouchure de la baie de Chesapeake (dont les eaux baignent la péninsule à l’origine de laquelle sera bientôt fondée la future capitale des Etats-Unis d’Amérique). Il repense à la grande canonnade qui vient d’avoir lieu, et qui vient de décider du destin de la Révolution américaine. Il observe le débarquement de l’artillerie de siège et des bataillons de soldats aux uniformes blancs, qui prennent la route de Yorktown. Il se souvient de son départ des Antilles avec toute son escadre un mois plus tôt. Qui aurait pu imaginer qu’un plan aussi risqué et audacieux aurait ainsi parfaitement réussi ?

2 août 1781, sur les côtes de Saint-Domingue. Dans sa cabine de commandement, l’amiral de Grasse vient de réunir les commandants des 24 fiers vaisseaux de lignes qui constituent son escadre (en même temps que l’aboutissement de la marine de guerre à voile de l’époque). Les plans franco-américains viennent de changer, et chacun d’eux et leur flotte vont bientôt entrer dans l’incroyable partie d’échecs qui se joue entre l’Europe, les Antilles et la côte est nord-américaine.

Le Ville de Paris, le vaisseau amiral de l'escadre de De Grasse, juste avant son départ de Saint-Domingue
Le Ville de Paris, vaisseau amiral de l’escadre de De Grasse, juste avant son départ de Saint-Domingue (illustration issue de la splendide bande dessinée de Jean-Yves Delitte : « Les grandes batailles navales – Chesapeake », éd. Glénat, 2017, p. 16-17)

Carte des Treize Colonies britanniques d'Amérique du Nord (et futurs Etats-Unis d'Amérique, suite à la guerre d'Indépendance américaine)
Une magnifique carte des Treize Colonies britanniques (plus la Floride !)

Depuis un moment en effet, la situation est dans l’impasse. Une première armée britannique, commandée par Sir Henry Clinton et forte de 10 000 hommes, est solidement retranchée dans New York, la plus grande ville des treize colonies anglo-américaines, en rébellion depuis maintenant deux ans (endroit où elle bénéficie du ravitaillement de la Royal Navy ainsi que du support naval de l’escadre de l’amiral Graves, un des commandants en chef de la flotte britannique déployée en Amérique du Nord).

Une deuxième armée, les 7 500 hommes du général Cornwallis, vient de prendre position à Yorktown, dans la baie de Chesapeake. Après une campagne d’occupation des colonies du sud, celui-ci vient en effet de se rabattre sur la bourgade virginienne afin de permettre à son armée décimée par la malaria de se reposer, se ravitailler, et de bénéficier là-aussi du support de la Royal Navy (notamment potentiellement de l’escadre de l’amiral Hood, qui croise alors dans les Antilles, en réaction à la présence de l’escadre française de De Grasse dans ces mêmes eaux…).  

En face, la situation est assez désespérée. Depuis leur éclatante victoire à Saratoga (où ils surprennent et défont une armée britannique entière), les insurgés américains vont de revers en revers, et ne parviennent pas à reprendre la main sur les grandes villes de la côte. Espaces côtiers où campe une armée britannique professionnelle et ayant infligé aux rebelles américains – souvent peu familiers de l’art de la guerre – de lourdes défaites en bataille rangée. Revers ayant réduit la stratégie de ces derniers depuis des mois à des opérations de guérilla peu à même d’infléchir le cours de la guerre, et ainsi de faire flancher la solide détermination britannique à conserver ses colonies nord-américaines dans le giron de la Couronne.

Certes, la présence du corps expéditionnaire français (les 6 000 hommes du compte de Rochambeau au nord et La Fayette et ses 4 000 volontaires au sud) constitue depuis son arrivée un appui de poids pour les indépendantistes américains, permettant à Washington et ses volontaires et miliciens de bénéficier du soutien terrestre et tactique d’une véritable armée professionnelle ; mais celle-ci n’est pas encore vraiment entrée dans la danse. Cela va toutefois bientôt changer, à l’initiative de Rochambeau.

Apprenant le repli de Cornwallis sur Yorktown, Rochambeau, qui s’était entendu avec Washington en mai pour marcher sur New York (et sans même consulter ce dernier), fait prendre la direction de la Virginie à tous ses hommes, et envoie un message urgent à l’amiral De Grasse – qui s’apprêtait à quitter les Antilles avec toute sa flotte pour escorter à travers l’Atlantique un immense convoi de 160 navires marchands vers la France. Le plan est aussi simple sur le papier qu’audacieux et risqué à réaliser : faire converger sur Yorktown toutes les forces terrestres et navales franco-américaines, pour y bloquer et obtenir la reddition de l’armée de Cornwallis.

À la flotte française, le rôle d’assurer le blocus du port de Yorktown, afin d’empêcher tout ravitaillement et soutien des Britanniques par la mer, tandis que les troupes franco-américaines doivent encercler la ville. Il s’agit pour De Grasse de délaisser sa mission d’escorte pour foncer depuis Saint-Domingue vers le fleuve Chesapeake y acheminer des troupes en renfort et y bloquer l’estuaire avec ses navires (appuyé par ceux de Barras, commandant de l’autre escadre française qui doit, elle, converger sur la baie depuis le nord). Piégé dans Yorktown par les forces combinées de Rochambeau, Washington et Lafayette, le général Cornwallis n’aura ainsi de secours que depuis la mer, où les navires français seront là pour barrer le passage.

L'escadre de l'amiral De Grasse en route vers la baie de Chesapeake (illustration issue de la BD de Jean-Yves Delitte)
L’escadre de De Grasse en route vers la baie de Chesapeake (Jean-Yves Delitte, op. cit., p. 32-33)

Cette victoire décisive, qui se traduirait pour les Britanniques par la perte d’une armée entière dans leur entreprise d’écrasement des velléités indépendantistes de la plus riche et peuplée de leurs colonies, les inviterait probablement à négocier la paix. Mais cette opération combinée terre-mer demeure hautement périlleuse et aléatoire, d’autant que l’amiral Hood a également eu vent de la manœuvre, et fait voile depuis les Antilles à la recherche des vaisseaux français…

Zoom sur : une des plus remarquables opération combinée terre-mer de l’Histoire !

Face à l’impasse continentale, le 21 mai 1781, George Washington (le commandant en chef américain) et le comte de Rochambeau tiennent une conférence pour déterminer leur stratégie. L’Américain caresse l’idée d’attaquer New York, base principale des Britanniques, alors que le Français est plutôt partisan de forcer l’ennemi en Virginie, et ce plus particulièrement au niveau de l’embouchure de la Chesapeake, qui offre aux navires français un terrain de manœuvre favorable.

À l’issue de la réunion, Rochambeau emporte la décision. Toutefois, le projet est entièrement tenu secret. Par d’habiles manœuvres, Washington persuade même les Britanniques que l’objectif des alliés est New York. À cette fin, il fait par exemple construire un fort factice, et laisse intercepter des lettres qui dévoilent les plans de la prétendue campagne. Le général Clinton, chef de l’armée anglaise, ne réalisera que trop tard qu’il a été berné…

Dans un premier temps, le fougueux marquis de La Fayette, qui s’est mis au service des Américains peu après le début de la guerre, est envoyé en Virginie par Washington. Avec quelques 1 500 soldats américains, il a pour mission de rallier l’armée du général Greene qui s’efforce de chasser les Anglais de la colonie. La Fayette harcèle les unités du général Cornwallis et évite soigneusement une bataille rangée que ses maigres effectifs ne lui permettent pas de livrer (et qu’il aurait de toute façon bien peu de chances de remporter face à une armée britannique bien plus professionnelle et disciplinée que la sienne… !).

C’est néanmoins une étrange décision du général Clinton (que rien ne semble historiquement justifier si ce n’est une surestimation des forces américaines ou son antipathie pour son subordonné…) qui va précipiter les événements : Cornwallis reçoit l’ordre de son supérieur de se replier vers la côte, de ville en ville, jusqu’à Yorktown. Lieu qu’il atteint avec son corps expéditionnaire et où il s’enferme au mois de juillet, entreprenant aussitôt la fortification de la place. Craignant que ce recul ne soit le prélude à une évacuation par la mer (qui permettrait à Londres de récupérer son armée il est vrai gangrénée par la maladie pour mieux revenir en force plus tard), la Marine française reçoit alors l’ordre d’empêcher ce repli à tout prix.

C’est là qu’interviennent finalement les escadres françaises déployées par Louis XVI dans le théâtre atlantique. Et notamment celle de De Grasse, la plus forte, stationnée dans les Antilles. Celle-ci quitte alors Saint-Domingue pour la Chesapeake, où elle arrive le 3 septembre. Bientôt rejointe par une seconde flotte : l’escadre de l’amiral Barras, partie de Newport et arrivée ainsi en Virginie (et non vers New York, comme les Anglais s’y attendent). Dans le même temps, sur terre, les soldats de George Washington et les 6 000 hommes aguerris (plus les officiers d’élite) qui composent le corps expéditionnaire foncent vers le sud, à la barbe des Britanniques qui les perçoivent trop tard et seront incapables d’empêcher ces mouvements.

Le 28 septembre, après une coordination parfaite et hautement remarquable pour l’époque, toutes les forces navales et terrestres ont fait leur jonction autour de Yorktown. Le siège peut commencer.

Carte récapitulative des mouvements de troupes franco-américaines et britanniques menant au siège de Yorktown (1781)
Le siège de Yorktown : une des plus remarquables et audacieuses opérations combinées terre-mer de tous les temps (qui plus est combinée entre trois armées dont deux étrangères – l’armée continentale américaine et les forces terrestres et navales françaises !).

19 octobre 1781. Dans une clairière près de Yorktown, les troupes britanniques défilent entre un rang d’Américains et un rang de Français. Après 21 jours de siège, Lord Cornwallis vient de se rendre, et avec lui, le quart des forces britanniques engagées dans la guerre. Humilié, Cornwallis s’est fait représenter par le major-général O’Hara, chargé de remettre son épée aux vainqueurs. Ce dernier s’approche de Rochambeau, La Fayette et Washington placés côte-à-côte, et tend son épée à Rochambeau, mais celui-ci la refuse et en laisse la primauté à Washington. Commandant en chef des insurgés américains qui, quant à lui, reconnaîtra en l’amiral de Grasse « l’arbitre de la guerre ».

Il est certain que l’amiral français a été l’artisan de cette grande victoire, de même qu’une bonne dose de chance. Parti des Antilles à la poursuite de De Grasse, l’amiral anglais Hood et son escadre sont en effet arrivés à la baie de Chesapeake quatre jours avant lui, et la voyant déserte, ont cru la flotte française déjà passée et repartie vers le nord, vers New York. Apprenant enfin au bout de dix jours son erreur, et rejoint entretemps par l’escadre de Graves, Hood fait demi-tour et retrouve le 5 septembre une baie de Chesapeake remplie de navires français, en plein débarquement de troupes…

Laissant 4 de ses 28 vaisseaux de ligne garder la baie, De Grasse, en légère supériorité numérique (ce qui est loin de faire tout dans une bataille navale, qui plus est lorsque l’on affronte les très équipés et entrainés navires et équipages de la Royal Navy… !), vient alors immédiatement à la rencontre de la flotte britannique. S’ensuit un grand affrontement naval en règle, connu sous le nom de « bataille de la baie de Chesapeake », qui décidera du sort de l’opération et de la guerre.

Schéma de la bataille navale de la baie de la Chesapeake (1781)
Schéma de la bataille (avec en blanc les navires français et en noir les navires britanniques)

Dans la pure tradition de la tactique du combat naval de l’époque (celui de la « bataille en ligne »), l’affrontement s’apparente à une violente « canonnade » qui fait de gros dégâts des deux côtés, mais davantage chez les Britanniques, qui comptent plus de tués et de blessés, et dont surtout presque tous les vaisseaux de l’avant-garde sont endommagés, les obligeant à rompre le combat et à fuir une flotte française qui a ainsi victorieusement tenu le choc.

Une flotte française qui, en léger surnombre et moins éprouvée que son alter-ego anglaise, poursuit même cette dernière, mais ne parvient pas à la rattraper et rentre sur la Chesapeake. Retour où elle a la bonne surprise d’y découvrir l’escadre du compte de Barras, arrivée la veille (sans avoir heureusement croisée les Britanniques).

La flotte française réunie au complet peut ainsi poursuivre le blocus et le débarquement de ses troupes, pendant qu’à terre, Washington, Rochambeau et La Fayette font leur jonction et engagent le siège de Yorktown, bien aidés par les navires français qui pilonnent la ville et ses fortifications depuis la baie, ainsi que par l’artillerie débarquée par ces derniers (dont les tous nouveaux canons de Gribeauval, qui feront parler d’eux dans les armées et guerres napoléoniennes).

Carte du siège terrestre de Yorktown (détaillant les positions et attaques des troupes franco-américaines et britanniques)
Plan du siège de Yorktown (à noter la présence au sein de l’armée britannique des « mercenaires hessois », du nom de cette région du centre de l’Allemagne actuel où ont été recrutées par les Anglais ces troupes d’appui à l’étouffement de la cause indépendantiste)

Sur le plan international et évidemment pour la Grande-Bretagne, la reddition de Yorktown est un séisme politique. Le 19 octobre, elle provoque à Londres la chute du gouvernement britannique, et son remplacement par une nouvelle coalition gouvernementale favorable à la paix. Dès l’année suivante, entre une France et une Angleterre toute deux épuisées financièrement, s’engagent des négociations. Négociations qui déboucheront, encore une année plus tard, sur la signature du traité de Paris, qui reconnaît l’indépendance des Etats-Unis – déclarée sept ans plus tôt par le Congrès continental, et qui rend en outre à la France certaines de ses colonies perdues en 1763 (dont Sainte-Lucie et Tobago).

Une bien maigre compensation pour la France, qui aura ainsi lavé au prix d’un colossal effort de guerre et endettement l’affront de ses défaites subies durant la Guerre de Sept Ans et la perte de ses principales colonies en Amérique du Nord. Colonies perdues du royaume de France dont l’histoire est si étroitement liée à celle de sa participation à la guerre d’Indépendance américaine (et cette dernière à celle future de la grande révolution sociale et politique que le pays s’apprête à connaître), comme nous allons le voir dans la suite de cet article.

Carte des territoires des Etats-Unis d'Amérique ainsi que des possessions restantes des Européens (Britanniques, Espagnols,…) à la suite du traité de Paris (1783)
L’organisation du continent nord-américain à la suite du traité de Paris

… Fin de la partie I …

Dans la prochaine partie (véritable début de l’article après cette première plongée dans la période), nous reviendrons aux racines de la guerre d’Indépendance américaine et des raisons de l’engagement de la France au sein d’un conflit opposant en premier lieu la Couronne britannique à ses propres colonies, et se déroulant de l’autre côté de l’Atlantique…

Un conflit directement lié au grand affrontement précédent entre Français et Britanniques sur le continent nord-américain : la fameuse guerre de Sept Ans. Conflit en forme de véritable guerre mondiale, qui verra la France y perdre la quasi-totalité de ses colonies, et cultiver depuis lors, patiemment et méthodiquement, un profond désir de revanche… À bientôt !

Un chouette article à lire en attendant la suite… ! (et à lire de tout façon car cette histoire précède et est à la racine de la guerre d’Indépendance américaine, que vous comprendrez mieux après cette super série d’articles… !)

À lire également en attendant la suite : ma série d’articles sur la guerre de Sept Ans, cette première « guerre mondiale » de l’Histoire directement à l’origine de la guerre d’Indépendance américaine (qui la suit ainsi de dix ans).

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Cet article a 4 commentaires

  1. Bayard

    Beau résumé, cette entreprise audacieuse mérite qu’on ne l’oublie pas. Toutefois, a noter un gros paquet d’erreurs de fond et d’analyses à l’emporte pièces, qui détonent et c’est bien dommage.

    1. Bonjour Bayard, Pouvez-vous développer ce que vous considérez comme tel ? Je rappelle que cet article ne constitue qu’une simple accroche du sujet, qui sera traité en profondeur, une fois d’abord terminé mon énorme série sur la guerre de Sept Ans (que je vous invite à consulter, si le contexte développé ici vous semble “léger” : c’est logique, ce n’était pas l’objet de ce petit article.. Le grand contexte, je suis en plein en train de finir de l’écrire 😉 )

  2. Bayard

    La guerre d’Amérique n’est pas pensée par la nécessité de prendre une revanche, mais dans le but de garantir non seulement les equilibres avec les neutres mais surtout la liberté des mers. Le poids du soutient matériel et financier de la France en Amérique l’oblige a terminer cette guerre qui n’en finit plus et qui epuise nos finances. En 1780 le projet de descente en Angleterre avorte en raison d’une levée de boucliers diplomatique en Europe, c’est pour cela que Louis XVI envoie Rochambeau terminer le travail, avec l’effectif pour une seule bataille. Rochambeau dout renoncer devant New-York , et convaincre Washington d’aller a Yorktown. Le mouvement se fait a la barbe des anglais. Lafayette est arrivé en 77 , avec juste une poignée d’officiers transfuges du secret de Louis XV . De Grasse est intervenu sans ordre, a la seule demande de Rochambeau, en gageant ses biens propres. Il faut parler de l’escadre de Barras qui porte le matériel de siège.
    Il y a de nombreux détails à revoir.

    1. Parfaitement d’accord. Mais au risque de me répéter : ceci n’est qu’une introduction à la véritable série, qui n’a pas encore commencé (et que j’écrirai finalement après celle de la guerre de Sept Ans, qui aura posé énormément du contexte nécessaire à la compréhension des tenants et aboutissants de l’implication de la France dans la guerre d’Amérique). Yorktown et tout le reste sera intégralement réabordé beaucoup plus en profondeur à ce moment.
      Je vous renvoie en attendant vers les 3 (énormes) articles que j’ai déjà publié sur les “origines de la guerre de Sept Ans” ; cela vous donnera je pense une idée du niveau de finesse de mes écrits – et rassurera peut-être vos inquiétudes 😉

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