You are currently viewing Aux origines de la guerre de Sept Ans (CHAPITRE IV) : la guerre de Succession d’Autriche (1744-1748), la première véritable guerre mondiale de l’Histoire ?

Aux origines de la guerre de Sept Ans (CHAPITRE IV) : la guerre de Succession d’Autriche (1744-1748), la première véritable guerre mondiale de l’Histoire ?

Le terme et même le concept peuvent paraître un peu éculés, et pourtant, rien n’est jamais affaire de détail en Histoire. La guerre de Succession d’Autriche a-t-elle été la véritable « première guerre mondiale de l’Histoire » – statut généralement attribué à la guerre de Sept Ans qui lui succède chronologiquement ? On m’objectera que la guerre de Succession d’Espagne (1700-1714) – que je vous ai aussi racontée ! –, voire même la guerre de la Ligue d’Augsbourg avant elle (1688-1697), avaient déjà été des guerres mondiales. Ce qui est vrai, mais après tout, peu importe, car là n’est pas fondamentalement le plus important.

Ce qui est important, ici et maintenant, c’est de saisir le caractère planétaire, global, quasiment holistique, de la rivalité qui oppose la France et l’Angleterre du XVIIIe siècle – et dont la guerre de Succession d’Autriche va ainsi constituer le premier grand affrontement. Comme vous l’avez maintenant normalement compris, c’est surtout la seconde qui caresse à ce moment de l’Histoire l’ambition d’accéder à l’hégémonie des océans et du commerce mondial, et qui est de même solidement déterminée à éliminer tous les rivaux qui se trouveraient potentiellement sur sa route en la matière. Les Provinces-Unies en ont fait les frais quelques décennies plus tôt (elles se sont d’ailleurs en quelque sorte fondues, sur le plan maritime et marchand, dans la nouvelle puissance anglaise). L’Espagne aussi – attaquée à coups de canons en 1739 pour n’avoir pas voulu ouvrir grand les marchés intérieurs de ses immenses colonies américaines aux produits britanniques (quand la même Angleterre impose pourtant elle aussi de son côté à ses Treize Colonies américaines l’exclusivité des importations et exportations avec elle-même… !) – en sait quelque chose. En ce milieu des années 1740, c’est au tour de la France de goûter globalement le coût qu’il y a de se trouver sur la route de l’ambition britannique à la domination des mers et des grands espaces coloniaux (Amérique du Nord et Indes en premier lieu).

La France non plus n’est pas une enfant de chœur. En ce temps-là, à vrai dire, personne ne l’est. La France a de gros intérêts dans le monde colonial. Elle contrôle ou exerce alors son influence sur pas loin du tiers de l’Amérique du Nord, à peu près autant sur le sous-continent indien (ce qui est nouveau), et elle fait surtout son beurre de ses colonies des Antilles, qui constituent sa principale source de richesses outremer (et se trouvent donc logiquement au centre de sa géostratégie coloniale et maritime). Nous avons vu dans le chapitre précédent que presque par inertie et réflexe pavlovien, la France s’est engagée dans le conflit continental de la Succession d’Autriche. Il y a là logiquement de vieux réflexes et près d’un millénaire de conditionnement de la haute noblesse, à aller jouer les arbitres des Allemagnes et même à tenter de contrôler indirectement l’Europe centrale. Mais nous ne sommes plus aux temps de Charlemagne ni même des guerres d’Italie, quand la France regardait vers la Méditerranée au moment où toute l’Europe ou presque prenait la voie du grand large. Pour la première fois de son histoire en effet, en ce milieu de XVIIIe siècle, la France regarde et vit au rythme des lointains, du vaste monde qui se trouve au-delà de ses belles et riches campagnes agricoles. Pour la première fois, la France – ou du moins une partie d’entre elle, une part d’elle (nous en reparlerons dans le hors-série qui suivra) – a pris la mer, et y voit la prospérité et l’avenir.

Voici qui nous ramène à notre guerre de Succession d’Autriche. Nous l’avons bien vu dans la partie précédente, à l’image de ce qui sera véritablement aux racines de la Première guerre mondiale, ce conflit intervenant après près de trois décennies de paix solide répond avant tout, au-delà de tensions intracontinentales incontestables, à la logique de rivalité entre deux impérialismes, au choc entre deux concurrents à l’échelle supra-européenne. En l’occurrence et dans notre cas : au duel entre la France et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne, dont les colonies sont rivales en Amérique du Nord et en Inde, dont les commerces sont en compétition et se jalousent ; et globalement dont les intérêts sont partout fondamentalement antagonistes. Seule la guerre semble maintenant à même de résoudre l’équation. Pauvre en affrontements de grande envergure hors du théâtre européen, la guerre de Succession d’Autriche va pourtant intégrer comme vous allez le voir tous les ingrédients et propriétés d’une guerre mondiale, et surtout poser les bases et le terreau du conflit suivant – puisque cette dernière aboutira à un retour au statu quo qui n’aura rien résolu des contentieux coloniaux, rendant la perspective d’un nouveau conflit quasi inévitable au départ de ces espaces.

Comment la Marine française, à la pointe de la technologie nous l’avons vu mais en si large infériorité vis-à-vis de la Royal Navy, va-t-elle s’en sortir durant cette guerre ? Les colonies vont-elles résister ? Le ministre de la Marine Maurepas va-t-il parvenir à protéger les liaisons aussi bien que le commerce maritimes – dont les précieux convois marchands sont en même temps si vulnérables et si importants à la prospérité de l’économie française de l’époque ? C’est ce que nous allons voir dans le cadre de ce chapitre consacré à la dimension planétaire et maritime de la guerre de Succession d’Autriche, un affrontement vous l’avez compris en forme de premier (mais pas de dernier) grand choc entre la France et la Grande-Bretagne – les deux pays dont la rivalité et l’antagonisme participent plus que nul autre dans les faits, en ce Siècle des Lumières, à écrire l’Histoire du monde. Bonne lecture !


Dunkerque, février 1744, sur les quais du port. Après un dernier regard vers le large, les officiers de marine se regardent en hochant la tête : il est l’heure. L’heure en effet de faire voile vers l’autre rive de la Manche, vers l’Angleterre, pour une mission plus qu’audacieuse. Assemblés là depuis des semaines, les soldats aux couleurs blanches de la Royauté embarquent sur les frêles navires de bois qui doivent les porter sur les côtes de l’ennemi héréditaire, dans une mer battue par les vents. Cette opération, depuis le début, ils n’y croient pas vraiment. À choisir, nombre d’entre eux préfèreraient plutôt combattre avec les leurs aux Pays-Bas, où la France s’apprête à lancer une grande offensive, et à bientôt y enchaîner les victoires. Mais ont-ils seulement le choix ?

* * *

Hiver 1743, Versailles, cabinet de Maurepas. Le secrétaire d’État à la Marine regarde pensivement par la fenêtre quelques gens de Cour déambuler dans les beaux jardins à la française du château royal. Il soupire ; l’heure n’est plus maintenant, pour lui, à la détente. Depuis trois ans maintenant en effet, la guerre fait rage. L’armée française est engagée en Europe centrale, en support aux troupes des rois de Bavière et de Prusse. Théâtre où après quelques victoires rapides, elle a subi de sérieux revers contre la coalition ennemie constituée derrière la prétendante autrichienne, la jeune Marie-Thérèse. En Italie aussi, la France est engagée en soutien à son allié espagnol, Philippe V. Engagé dans une entreprise de reconquête (téméraire) des anciens territoires perdus de son pays, l’oncle du roi de France y est déjà embourbé dans une situation précaire. Déjà, les liaisons maritimes entre la péninsule italienne et l’Espagne ont été coupées par la Royal Navy, qui règne en maîtresse sur la Méditerranée. La mer… Maurepas sait fichtrement bien que c’est là que réside désormais tous les enjeux, et combien les dominations navales d’aujourd’hui décident des victoires (ou défaites) générales de demain…

En cette hiver 1743, sur le plan maritime, la France est déjà dans une situation difficile. Certes, le royaume n’est pas (encore) officiellement en guerre avec celui de Grande-Bretagne, mais comme Maurepas et tout le monde le sait très bien, c’est tout comme. Le 27 juin 1743, à Dettingen (en Allemagne), les armées française et britannique se sont en effet affrontées sur terre. Les deux pays sont, de facto, déjà en guerre. Et quels risques cette guerre fait-elle peser sur les colonies ! En cette fin 1743, la Marine française n’aligne, au mieux, que cinquante vaisseaux de ligne et une trentaine de frégates, contre cent vingt vaisseaux et presque autant de frégates pour le voisin britannique. Quatre-vingt navires de guerre qui doivent à eux seuls assurer les quatre importantes missions suivantes, vitales au commerce et à la survie économique du royaume :

  1. Protéger les côtes du royaume et les défendre contre toute attaque ennemie ;
  2. Protéger les colonies et tenter de les ravitailler en armes, hommes, vivres et munitions ;
  3. Escorter et assurer la protection des 4 000 navires de commerce français de tout tonnage (dont 3 707 ont été recensés en 1730) ;
  4. Protéger les 1 600 bateaux de pêche français (1 200 pour la pêche côtière en 1730 ; 124 pour la pêche au hareng ; 296 pour la pêche de la morue ; une quarantaine de baleiniers en route vers le Spitzberg), montés par près de 42 000 matelots et pêcheurs ! (source des statistiques : La Marine française au XVIIIe siècle de Michel Vergé-Franceschi)

Comme c’est parfois le cas dans l’Histoire (on peut penser notamment aux pilotes de la Royal Air Force durant la bataille d’Angleterre), rarement le sort d’autant dépend d’aussi peu d’hommes. Aux affaires depuis déjà deux décennies, Maurepas connaît mieux que personne les insuffisances de la Marine française (en même temps que le rôle plus central que jamais dans laquelle cette guerre s’apprête à la placer). Heureusement, il a anticipé. Depuis le déclenchement de la guerre anglo-espagnole en 1739 (la guerre de l’oreille de Jenkins, que nous avions étudiée en détail dans le chapitre II), la Marine française est en effet sur le pied de guerre.

Effectivement – et fort heureusement pour elle, ce n’est pas une Marine française totalement impréparée ni complètement « larguée » qui entre dans la guerre maritime de haute intensité qui s’amorce à partir de l’année 1744. Comme nous l’avons vu en détail dans le chapitre I, depuis son arrivée au ministère de la Marine en 1723, Maurepas a fait des efforts et des réformes – beaucoup de réformes ! – pour redresser l’état pitoyable dans lequel se trouvait alors la Marine de guerre. En deux décennies, les modalités de recrutement naval ont été grandement transformées et rationnalisées, la formation des ingénieurs et des officiers de marine améliorées, les infrastructures considérablement développées (agrandissement et réorganisation administrative des grands arsenaux – Brest, Rochefort, Toulon,…), le système d’approvisionnement et les chaînons industriels de l’armement naval perfectionnés.

Sur le plan des infrastructures outremers, la grande forteresse maritime de Louisbourg (île de Cap-Breton), porte d’entrée et sentinelle de la Nouvelle-France, est achevée à grand frais ; aux Indes, Dupleix a fait fortifié Pondichéry, et Port-Louis a été fondée sur l’Isle-de-France (actuelle île Maurice). Certes, la Marine française ne dispose toujours pas de grandes bases navales dans les Antilles, ni d’infrastructures d’entretien naval dignes de ce nom dans aucun des espaces coloniaux et maritimes qu’elle contrôle (Amérique du Nord, Antilles, Sénégal, Indes,…), et qui permettraient d’y rénover sur place les navires des escadres déployées en temps de guerre dans ces théâtres d’opérations. Mais la situation demeure néanmoins toujours meilleure qu’en 1713…

C’est cependant sur le plan des améliorations technologiques et scientifiques que les efforts les plus conséquents ont été portés par Maurepas. Comme nous l’avons vu également dans le chapitre I, la Marine française est désormais entrée dans l’ère des Lumières, avec la fondation de l’Académie de Marine de Brest et les nombreuses interconnexions tissées entre les savants de l’Académie des Sciences et l’intelligentsia de la Marine. Grâce aux efforts menés en particulier sur le domaine tactique essentiel de la construction navale, les ingénieurs français ont mis au point (après deux décennies d’intenses recherches et réalisations de prototypes) les meilleurs navires de guerre de leur époque, supérieurs dans presque tous les domaines (manœuvrabilité, puissance de feu, pré-standardisation,…) à ceux des marines concurrentes et même aux redoutables vaisseaux de guerre de la Royal Navy. Encore faut-il toutefois disposer d’équipages qualifiés et en nombre suffisant pour conduire ces excellents bâtiments de guerre (sans même parler de la problématique du commandement), ce qui demeurera jusqu’aux guerres napoléoniennes l’une des plus grandes faiblesses structurelles de la Marine française. Et encore faut-il utiliser ces remarquables vaisseaux de guerre à bon escient, dans le cadre d’une doctrine et de tactiques navales adaptées aux nouvelles réalités de la guerre sur mer (en particulier vis-à-vis d’une Royal Navy dont la stratégie s’avère de plus en plus offensive, et le comportement sur mer toujours plus prédateur et agressif – mais de cela nous reparlerons en détail dans le prochain chapitre… !).

* * *

1740-1744 : l’entrée progressive de la Marine dans la guerre

Comme nous l’avons vu dans le chapitre II avec l’étude de la guerre de l’oreille de Jenkins, c’est dans les Caraïbes qu’est rompue la longue et remarquable période de paix qui avait succédée aux traités d’Utrecht de 1713. Certes, en théorie, la guerre maritime qui vient d’éclater dans les eaux de l’Atlantique et de la Méditerranée ne concerne que l’Espagne et la Grande-Bretagne, la France du cardinal de Fleury étant prudemment demeurée neutre dans le conflit entre ses deux puissants voisins. Mais nul n’est dupe. Depuis le premier Pacte de Famille de 1733 (conclu durant la guerre de Succession de Pologne), la France et l’Espagne des Bourbons (et les deux vastes empires coloniaux mondiaux qui vont avec) ont entérinée leur alliance géopolitique, afin de faire face à la montée en puissance maritime de l’Angleterre et son désir toujours plus affiché de disputer à ces deux-là l’hégémonie du monde colonial et des réseaux commerciaux mondiaux (via l’essor de ses colonies, mais aussi via sa surpuissante Royal Navy, dont l’entretien de sa flotte 120 vaisseaux de ligne – plus que l’Espagne et la France réunie ! – ne peut décemment s’interpréter que comme l’instrument d’une stratégie pensée de domination des mers).

Je recommande le visionnage de cette excellente petite vidéo de Questions d’Histoire sur la première guerre de l’opium. Si plus d’un siècle sépare cette dernière des événements qui nous intéressent ici, la mise en perspective n’en demeure pas moins intéressante, tant les intérêts et mécanismes à l’œuvre en sont semblables. Et puis comme vous le savez, l’Histoire des motivations des guerres n’est pas loin d’être une éternelle répétition des mêmes schémas…

C’est d’ailleurs précisément dans cette perspective que la Grande-Bretagne a déclaré en 1739 la guerre à l’Espagne, ne tolérant plus les actes de déprédation de la première sur ses navires marchands (de contrebande…), mais surtout dans la volonté d’ouvrir par la force les marchés du vaste empire espagnol à ses produits (une guerre mercantile pour ainsi dire dans la plus pure tradition britannique, puisque la recette sera appliquée à de multiples occasions, l’exemple le plus fameux étant probablement celui de la Chine dans le cadre des célèbres guerres de l’opium du XIXe siècle…). Au-delà de cet objectif économique et « réticulaire » (c’est-à-dire de contrôle des réseaux – en l’occurrence des réseaux commerciaux et maritimes internationaux), il s’agit aussi pour l’Angleterre de poursuivre dans les Caraïbes quelques visées de conquête territoriale stratégique, en raflant idéalement aux Espagnols quelques précieux ports bien placés et peut-être une ou deux îles à sucre hautement lucratives… (voir encadré sur le sujet un peu plus bas !)

Une France en posture défensive et demeurée neutre dans le cadre du conflit anglo-espagnol de l’oreille de Jenkins…

Quelques mois après la déclaration de la guerre, comme nous l’avions déjà vu dans le chapitre II, la Royal Navy s’en prend ainsi à plusieurs grands ports espagnols des Caraïbes (notamment Portobelo, assiégé, capturé puis rasé par les Britanniques en décembre 1739). Le succès opéré sur Portobelo encourage alors pour mémoire le gouvernement anglais à financer un nouveau grand raid contre Carthagène-des-Indes, qui sera le désastre que l’on connait.

Chargé de la défense des colonies en même temps que de l’empire commercial français, le ministère de la Marine et son ministre Maurepas ne sont pas restés passifs face à la menace que l’impérialisme britannique semble faire toujours davantage peser sur le commerce français. Certes, les budgets serrés n’autorisent pas Maurepas à aligner autant de vaisseaux que sa rivale anglaise, ni à armer longuement de grandes escadres déployées de façon défensive sur les différents théâtres de rivalité coloniale (Amérique du Nord, Caraïbes, Indes). Il s’agit néanmoins d’occuper le terrain et de montrer que la France n’est pas absente de ses espaces coloniaux, en déployant une stratégie préventive (défense des colonies et des convois marchands), et en procédant à quelques démonstrations de force. La démarche semble en effet hautement nécessaire, tant se multiplient les attitudes hostiles de la marine britannique envers les navires français – pourtant théoriquement « neutres » ! – partout où la première est déployée…

La stratégie est plus ou moins habile : à l’image de la guerre continentale où la France met « à la disposition » de ses alliés (Bavière, Prusse) ses propres régiments sans entrer directement en guerre contre l’Autriche, Maurepas déploie la flotte française dans les Antilles et en Méditerranée là où la Royal Navy s’en prend aux intérêts espagnols (mais menace aussi à moyen terme vous l’avez bien compris les intérêts et possessions françaises). La mission de la Marine française se veut purement défensive et préventive : il s’agit de protéger les Espagnols et leurs colonies sans attaquer ni menacer les escadres et possessions britanniques, afin d’éviter que cette dernière ne dispose d’un bon prétexte pour lui déclarer à son tour la guerre.

En aparté : l’Angleterre a-t-elle vraiment cherché à éviter l’entrée en guerre de la France lors de la guerre de l’oreille de Jenkins ?

Sur ce sujet toujours épineux des stratégies officielles – et officieuses – des différents protagonistes d’un conflit, soulignons ici combien il est difficile toujours aujourd’hui d’évaluer la réalité des intentions britanniques au plus haut niveau vis-à-vis de la France durant la période qui va de l’éclatement du conflit anglo-espagnol à l’entrée en guerre officielle de la France contre l’Angleterre (c’est-à-dire donc de 1739 à 1744).

En 1739, lorsque éclate la guerre entre la Grande-Bretagne et l’Espagne, tous les pays d’Europe (et particulièrement nos deux concernés) s’attendent en effet globalement à ce que la France rejoigne la guerre au côté de son grand allié espagnol (une hypothèse avec laquelle semblait d’ailleurs dès le début avoir compté l’Angleterre, et établi ses plans en conséquence). Sortant chacune d’un grand effort de redressement naval, les flottes françaises et espagnoles réunies sont alors en mesure d’aligner un nombre de vaisseaux de ligne faisant jeu égal avec celui de la Royal Navy, qui craint à juste raison que ces dernières, une fois la France entrée en guerre, ne mènent des opérations combinées contre les territoires britanniques. Dès 1740, les rumeurs d’un vaste projet de ce type circulent même en Grande-Bretagne, où l’on s’alarme d’une invasion supposée imminente de l’île par un grand corps expéditionnaire franco-espagnol (qui serait alors en cours de préparatif dans les ports respectifs de Brest et de Ferrol).

Bien que ce débarquement ne soit pas (encore) d’actualité (et rapidement vérifiable au demeurant par les remarquables services d’espionnage dont disposent déjà depuis un moment l’Angleterre), la menace d’une tentative de débarquement sur l’île apparaît alors suffisamment sérieuse aux autorités britanniques pour engager de solides mesures de prévention et de dissuasion d’un tel projet (qui sera bien porté en pratique par la France quelques années plus tard, au moment de son entrée officielle dans la guerre de Succession d’Autriche, comme nous allons en reparler très bientôt). Les deux tiers des force terrestres stationnées en Grande-Bretagne sont en conséquence redéployées à Londres et dans tout le sud-est de l’Angleterre, face au Pas-de-Calais (et aux grands ports français de Boulogne et de Dunkerque), tandis qu’une escadre d’une grosse vingtaine de vaisseaux patrouille et surveille continuellement la Manche et l’activité côtière française…

Durant cette période de neutralité de la France vis-à-vis de l’Angleterre dans la guerre de Succession d’Autriche (soit de décembre 1740 à février 1744), bien que cette dernière s’active évidemment à défendre ses intérêts ainsi que ceux de ses alliés continentaux, la Grande-Bretagne semble donc s’efforcer de limiter ou de retarder autant que possible les opérations pouvant servir de prétexte officiel à la France pour lui déclarer la guerre (et notamment toute grande offensive contre l’Empire espagnol, de crainte qu’une victoire britannique majeure ne précipite en effet l’entrée en guerre de la France au titre de « l’équilibre des puissances » (« balance of power ») si cher à la politique extérieure de Louis XV). Une politique de relative retenue qui demeure néanmoins peine perdue, au sens où le roi de France comme ses ministres semblent chaque jour accepter davantage l’inéluctabilité de la guerre avec la Grande-Bretagne dans le cadre dun conflit de si haute intensité (conflit qui réunit comme nous l’avons vu la quasi-intégralité des puissances européennes – Autriche, Grande-Bretagne, Espagne, Provinces-Unies, Russie, Prusse, Saxe, Bavière, Suède, Piémont-Sardaigne, etc.). Comme Versailles le mesure bien, le risque d’extension du conflit à l’échelle planétaire est en effet considérable, considérant particulièrement la tension extrême qui opposent les intérêts français et britanniques en Inde et en Amérique du Nord (où tous les derniers conflits européens eurent d’ailleurs déjà une répercussion locale… !).

Provoquer tout à fait intentionnellement son rival jusqu’à le pousser à vous déclarer la guerre et faire ainsi de lui théoriquement « l’agresseur » demeure, il faut bien le dire, une véritable « tradition » de la géostratégie anglosaxonne (britannique puis plus tard américaine), comme le rappelle bien l’historien militaire Laurent Henninger dans cet entretien…

De façon générale, les historiens d’outre-Manche insistent donc sur la prudence et la retenue du gouvernement britannique vis-à-vis de la France, étant les premiers à avancer que la Grande-Bretagne aurait volontairement limité ses opérations d’agression contre les Espagnols dans les Caraïbes afin de ne pas provoquer l’entrée en guerre de la France. De mon point de vue (subjectif), ce beau récit semble en partie mis en doute par les agissements en mer des commandants de la Royal Navy vis-à-vis des navires français sur la même période, qui comme nous allons le voir, sont marqués par une agressivité de plus en plus patente… (point de vue majoré au passage pour qui connaît la discipline et l’obéissance aux ordres qui caractérisent structurellement les équipages comme le commandement maritime anglais !)


… mais néanmoins confrontée à l’attitude de plus en plus hostile de la Royal Navy

Intentionnalité ou non des Britanniques de s’attaquer directement aux intérêts français dans le monde colonial, dans les faits, le résultat sera le même, et laissera la France bien obligée de réagir. Quelques moins à peine après le début du conflit anglo-espagnol, le ministre de la Marine a d’ailleurs déjà pris les devants. Au début de l’année 1740, Maurepas charge ainsi une puissante escadre (14 vaisseaux et 5 frégates, sous la conduite du marquis d’Antin) de se positionner dans les Antilles et d’y défendre les intérêts espagnols et français. Parti de Brest en septembre, d’Antin y est rejoint en janvier par deux autres petites escadres conduites par La Roche-Allart et Roquefeuil. La flotte croise plusieurs semaines entre la Martinique et Saint-Domingue, avant que d’Antin (dont les équipages sont décimés par une épidémie de fièvre jaune) ne rentre à Brest début février – pour y mourir d’ailleurs à peine quelques jours après…

Si cette concentration de force ne s’y traduit donc par aucun engagement majeur, le déploiement français défensif dans les Antilles est l’occasion d’y constater comme déjà annoncé l’attitude de plus en plus hostile d’une certaine Royal Navy. Après avoir saisie une corvette de l’escadre de D’Antin en route pour Saint-Domingue en novembre, des vaisseaux anglais attaquent près de Saint-Domingue 4 navires français qui croisaient au large de la grande île sucrière des Antilles françaises. Les Anglais prétexteront les avoir pris pour des Espagnols… L’accident est loin d’être un cas isolé : en 1741 (c’est-à-dire l’année suivante), 4 vaisseaux français qui rentraient des Antilles à Toulon sont violemment attaqués de nuit au large de Gibraltar lors de la traversée du détroit (il est vrai chasse gardée et grande base navale méditerranéenne de la Navy). Rebelote : la division anglaise de Barclay – qui les a d’ailleurs attaquée en naviguant sous pavillon… hollandais ! – prétendra à nouveau avoir pris les Français pour des Espagnols.

Déjà en grande tension depuis deux ans, la situation entre les marines française et britannique dégénère encore davantage au cours de l’année 1742. Si vous vous rappelez bien le chapitre précédent consacré au théâtre continental de la guerre de Succession d’Autriche, vous vous souvenez que l’Espagne s’est engagée dans la reconquête de ses territoires italiens perdus du duché de Milan, avec le soutien logistique et militaire de l’allié français. Ainsi, lorsque les Espagnols s’affairent à acheminer un important contingent de troupes vers la péninsule italienne, c’est accompagné également d’une escadre française (commandée par Court de la Bruyère et venue de Toulon) que le petit armada espagnol escorte son convoi de troupes de Carthagène aux côtes de la Ligurie. Cependant, au retour du convoi (et alors que l’escorte combinée franco-espagnole relâche dans Toulon), une escadre anglaise se présente devant la grande base navale française de Méditerranée et y établit rien de moins qu’un blocus de la ville ! Un blocus qui durera 22 mois – alors que les deux pays sont officiellement en paix… !

Pire : durant les mois qui suivent, non-contents de patrouiller à leurs aises dans les eaux provençales, les vaisseaux de l’escadre britannique de Matthews s’y attaquent en juin à 5 galères espagnoles, qui s’étaient réfugiées dans le port de Saint-Tropez. Sur place, les Anglais brûlent les navires, et menaceront même à nouveau quelques mois plus tard ses habitants d’incendier la ville. Alors que ses forces poursuivent le blocus de Toulon, Matthews fait en outre mouiller ses navires aux îles d’Hyères, et établit carrément un campement sur l’île de Port-Cros. Là, les Britanniques établissent leurs malades et blessés, y carènent leurs navires et y font même faire des exercices de tir, tout y recevant leur ravitaillement depuis leur grande base navale de Minorque (l’une des îles Baléares).

En 1743, l’humiliation continue : deux navires anglais poursuivent jusque dans la rade de Toulon plusieurs bâtiments de commerce français, et il faut faire tirer les batteries du cap Cépet pour faire cesser la chasse-poursuite. Si l’affaire se termine par des explications et excuses réciproques, la situation est devenue ainsi intensément humiliante pour les Français, qui subissent à Toulon un blocus impitoyable alors que la ligne officielle des deux gouvernements reste la paix…

Comme je vous y ai déjà sensibilisé plus haut, il est bien important de parler ici de « ligne officielle » du gouvernement français, car de la même façon que Louis XV dispose de canaux de diplomatie parallèle (via ses célèbres services du Secret du Roi), son État semble également opérer un drôle de double-jeu vis-à-vis du supposé non-ennemi britannique. En effet, considérons ceci : la déclaration de guerre officielle de la France à l’Angleterre de George II n’interviendra qu’en mars 1744, à la suite du combat du cap Sicié (l’affrontement naval d’envergure qui lèvera le blocus de Toulon, et dont nous reparlerons plus loin). Or, en cette fin d’année 1743, le gouvernement de Louis XV semble d’autant moins être en posture de chercher à éviter la guerre avec la Grande-Bretagne qu’il est en train de planifier activement rien de moins que l’invasion de cette dernière ! En effet, depuis quelques mois, en France, les stratégies ont changé. Suite à la mort de Fleury en 1743, le parti de la guerre a gagné du terrain à Versailles. Ayant probablement fait acte du caractère inéluctable de la guerre avec le Royaume-Uni, et étant assez au clair sur les intentions de sa rivale d’outre-Manche au travers des nombreux actes d’hostilité que lui a manifestés sa Navy, Louis XV, déjà engagé dans la guerre continentale en Europe centrale et en Italie contre l’Autriche, semble donc avoir accepté l’inévitable. Mieux : son nouveau gouvernement envisage même de frapper les premiers, en préparant dans le plus grand secret (mais à la connaissance néanmoins du renseignement britannique et de ses remarquables réseaux d’espionnage) un grand projet de débarquement d’un corps expéditionnaire français en Grande-Bretagne !

C’est un retournement de stratégie considérable : fin 1743, du côté français, il ne devient plus seulement d’actualité de se préparer activement à la guerre avec l’Angleterre, mais même carrément de l’anticiper. Du côté des ministres de Louis XV, on est en effet convaincu qu’une attaque directe contre la Grande-Bretagne est désormais nécessaire, l’invasion étant perçue comme seule à même de porter un coup décisif à l’économie britannique (et ce faisant d’impacter la remarquable « force de frappe » financière qui permet à Albion de financer l’essentiel de l’effort de guerre de ses alliés continentaux). Selon les plans français (dont le passage de la théorie à la pratique demeurera nous le verrons une toute autre affaire…), l’invasion des îles britanniques contraindrait ainsi l’Angleterre à sortir de la guerre, laissant le champ libre aux armées françaises sur le continent (et permettant ce faisant à la France de « plier » plus rapidement ses adversaires et de mettre fin plus rapidement à la guerre).

Zoom sur : le projet de débarquement (raté) en l’Angleterre de 1743-1744

Souvenez-vous du gros encadré du chapitre précédent sur la rébellion jacobite : depuis la Glorieuse Révolution de 1688 et leur éviction du trône d’Angleterre, les membres de la dynastie déchue des Stuarts tentent désespérément de récupérer leur Couronne perdue. Tout au long de la première moitié du XVIIIe siècle, « l’ancien Prétendant » (the Old Pretender) Jacques François Stuart a mené des soulèvements en Angleterre, en Écosse et en Irlande avec ses partisans pour tenter de regagner son trône. Tous se sont soldés par de cuisants échecs.

La France de la Régence puis du ministère du cardinal de Fleury n’ont guère soutenu ces initiatives de reconquête des Stuarts – qui avaient pourtant pour vertu de considérablement déstabiliser la Grande-Bretagne. Il est vraiment important de rappeler ici l’importance des réalités géopolitiques mouvantes et du maniement de l’art subtil de la Realpolitik, les grandes puissances n’ayant pas en effet attendu le XXe siècle pour implémenter à leur façon la guerre des trônes, le poker menteur, le bluff, l’attentat sous faux drapeau, et plus généralement les mille et une intrigues et manœuvres de l’art machiavélique de la (géo)politique.

Suite à la disparition de Louis XIV, après que les guerres de la fin de son règne aient laissé le pays exsangue (et aient dressé toute l’Europe contre lui), le Régent Philippe d’Orléans engage la France dans une politique extérieure pacifique et privilégiant la stabilité européenne, en faisant notamment la paix avec l’Angleterre (avec laquelle la France s’allie même pour rappel dans les années 1720 dans le cadre d’une courte guerre contre l’Espagne dirigée par l’oncle du roi de France !). Cette politique anglophile – et partagée des deux côtés de la Manche – est poursuivie par le cardinal de Fleury, qui prend la tête du gouvernement français en 1726. Habile et sage politicien, celui-ci parvient à désamorcer la plupart des conflits intérieurs (opposition janséniste et parlementaire, intrigues des grands seigneurs et des princes du sang,…), tout en maintenant une politique de paix qui a l’intérêt de favoriser l’activité économique et le commerce extérieur et de faire dans le même temps de sérieuses économies (Dieu sait en effet que la guerre est ruineuse !). Sur les plans économique et fiscal, cette politique porte remarquablement ses fruits puisque la France va connaître sous la période « bénie » de Fleury l’un des plus remarquables développement économique de son Histoire. Toute la population française enregistre alors une amélioration de ses conditions de vie, et pour l’une des (rares) fois de son Histoire, les impôts vont même baisser sous Fleury !

Fleury fut, sans titre, un Premier Ministre plus absolu et plus assuré qu’aucun de ceux qui l’avaient précédé dans cette place. […] Son gouvernement est une période de stabilité, de bon sens, de prudence et d’ordre.

pierre Gaxotte, Le Siècle de Louis XV, pp. 110-112

Bien qu’extrêmement favorable à la prospérité économique du pays, cette politique pacifique aura néanmoins son revers de la médaille. Au sortir de trente années de paix, la France a considérablement rogné sur ses dépenses militaires. La Marine de guerre a été négligée, et les crédits qui lui sont consacrés semblent ridicules au regard de ce que l’Angleterre investit pour sa part dans sa Royal Navy, mais aussi et surtout considérant le prospère empire maritime que ces décennies de paix ont permis à la France de développer ! Un empire qui entre toujours plus en friction avec celui de la Grande-Bretagne, rendant en ce tournant des années 1740 la recherche de la paix avec cette dernière, au mieux naïve, au pire complètement aveugle…

Quand Colbert léguait à sa mort 279 navires de guerre, Maurepas dispose, à l’orée de la guerre de Succession d’Autriche, de 51 vaisseaux et 27 frégates. Ceci, alors même que l’on vient de jouir d’une paix de trente ans – hormis le court épisode de la guerre de Succession de Pologne –, à l’origine de marges financières appréciables.

CYRILLE P. COUTANSAIS, L’EMPIRE DES MERS. ATLAS HISTORIQUE DE LA FRANCE MARITIME, P. 172

C’est dans ce contexte de plus en plus tendu dans le monde colonial que la France du début de la décennie 1740 commence à revoir sa stratégie géopolitique globale (officielle et officieuse) vis-à-vis de l’Angleterre. L’heure n’est plus en effet à expulser les activistes jacobites de son territoire pour faire plaisir à Londres, ni de raser les travaux de fortification du port de Dunkerque pour éviter d’inquiéter Albion. Avec l’éclatement des conflits de l’oreille de Jenkins puis de la Succession d’Autriche, la flotte est obligée d’être mise sur le pied de guerre par Fleury et Maurepas, tandis que dès l’ouverture des hostilités, à Brest, « on ressort des cartons les projets d’invasion de la Grande-Bretagne et on y consacre d’importants moyens » :

Dans un billet adressé au secrétaire d’État Amelot, en août 1740, Fleury a exposé lui-même le détail de ses intentions. D’abord, maintenir la paix sur le continent [raté !], avertir la Prusse [raté aussi !], rassurer la Hollande, ne point prendre d’engagements supplémentaires avec l’Espagne en vue de remaniements territoriaux en Italie [raté encore !]. En second lieu, « augmenter notre marine du plus de vaisseaux que nous pouvons d’ici au printemps prochain […], encourager les armateurs, se mettre en état d’en avoir au printemps prochain ». Aux Indes et en Louisiane, on se tiendra sur la défensive […]. Par contre, on prendra l’offensive au Canada […] et sur tous les marchés financiers.

Pierre Gaxotte, Le Siècle de Louis XV, p. 208

Malgré la lucidité du premier ministre français sur l’impasse (et le déficit total d’intérêts) pour Louis XV d’un engagement guerrier sur le continent dans le cadre de la crise de succession autrichienne, bientôt (et pour les raisons que nous avons vu dans le chapitre précédent), la France se retrouve complètement engagée dans la guerre continentale, et celle avec l’Angleterre, également partie prenante du conflit dans le camp opposé, semble inévitable. Déjà, en 1743, à Dettingen, comme nous l’avons vu également, des troupes françaises ont combattu des troupes britanniques, plaçant les deux pays dans une situation de guerre de fait. Plus que de la pressentir, cette guerre contre l’Angleterre, la France de l’année 1743 (qui vient de perdre son grand premier ministre en janvier) semble donc finir par s’y résoudre. Et à défaut d’avoir pensé une stratégie de fond sur le temps long contre le grand rival anglais faute de moyens (et peut-être aussi de vision…), on s’en remet donc à la politique de la petite semaine, avec un bon vieux plan de débarquement en Angleterre pour mettre un bon gros bazar dans l’île britannique et mettre ainsi Londres hors-jeu du conflit :

Fleury, jusqu’à sa mort, avait refusé d’envisager un débarquement en Angleterre et devant les risques de reprise des hostilités franco-anglaises, avait seulement donné son accord à un projet d’insurrection en Écosse […]. La mort de Fleury parut redonner une nouvelle chance aux Jacobites puisque le Cardinal de Tencin, le confident de Jacques III [le père de Charles-Édouard Stuart, NDLR] faillit être le successeur de Fleury ; lorsque Louis XV déclara qu’il serait son propre premier ministre, les chances des Stuarts s’évanouirent à nouveau jusqu’à ce que les échecs de la guerre en Allemagne, l’isolement diplomatique de la France et la menace d’une invasion autrichienne aient rendu nécessaire l’aide jacobite. En 1743, Louis XV, pensant que la meilleure forme de défense était l’offensive, envisagea un débarquement en Angleterre sans avertissement et sans déclaration de guerre officielle. Il s’adressa alors à la cour des Stuarts, à Rome, et pour donner une apparence de légitimité, demanda que Charles-Édouard, le fils aîné du prétendant [Jacques III] accompagnât l’expédition. […]

Jean Meyer et Jean Béranger, La France dans le monde au XVIIIe siècle, p. 177

Sur le papier, l’idée n’est pas si déconnante : malgré le peu de troupes qu’elle déploie dans l’absolu dans la guerre continentale relativement aux autres puissances, la Grande-Bretagne y joue néanmoins un rôle tout à fait substantiel, en arrosant de subsides ses différents alliés continentaux (c’est-à-dire donc les adversaires continentaux de la France). La remarquable puissance financière britannique y permet ainsi de maintenir ses derniers à flots, les autorisant à continuer de mobiliser des masses de troupes importantes dans le théâtre d’Europe centrale contre la France et ses alliées (Bavière, Prusse,…). Ce faisant, la Grande-Bretagne ne compte presque aucunes troupes pour défendre son île, la maigre armée régulière dont elle dispose (comparée à la France) étant presque intégralement engagée en Allemagne. Une situation potentiellement dangereuse qui n’a évidemment pas échappée à la France…

Quelque part vers la fin de l’année 1743, l’opération est décidée. Maurepas affecte à l’organisation du projet l’un de ses plus brillants seconds, Joseph Pellerin (entré à la postérité pour sa remarquable collection de pièces anciennes et ses travaux qui feront de lui l’un des pionniers de la numismatique !). Sous sa direction, tous les grands ports de la Manche s’active à la construction d’une flotte de navires de transports, qui se réunit progressivement à Dunkerque, où se concentre également un corps expéditionnaire de près de 15 000 hommes commandé par le maréchal de Saxe (le futur vainqueur de la campagne des Pays-Bas).

Approché depuis des années et après des mois de tractations secrètes, le prétendant jacobite est de la partie. James étant désormais trop vieux pour participer à une expédition militaire, c’est son fils Charles Édouard Stuart (que normalement maintenant vous connaissez bien… !) qui rejoint la France et bientôt Dunkerque pour se tenir prêt à traverser la Manche avec l’armée d’invasion. L’Espagne suit également les préparatifs de près : à la fin de l’année, elle a signé avec la France de Louis XV un nouveau « Pacte de Famille », par lequel les deux Monarchies bourbonnes se promettent d’unir leurs forces contre les visées impérialistes croissantes de l’Angleterre de George II (dont l’énorme marine de guerre fait plus qu’inquiéter des deux côtés des Pyrénées). Il semble temps de porter un coup décisif à la Couronne anglaise, et avec elle, la bien trop grande force navale qu’elle entretient à grand frais – et qui fait peser de tels risques sur les colonies et le commerce espagnol et français outremers…

Le plan est le suivant : l’escadre du Ponant (la flotte de l’Atlantique) doit sortir de Brest et prendre quelques jours le contrôle de la Manche (ou du moins s’y assurer que la voie est libre), ce qui permettra à la flotte de transport de traverser le détroit et de débarquer le corps expéditionnaire sur la côte anglaise à hauteur de Maldon, dans l’Essex, et ce faisant de menacer la capitale du régime hanovrien. En théorie, ça peut fonctionner, en théorie… Mais en pratique, cela va se révéler, une fois n’est pas coutume, une sacrée galère…

Comme d’habitude, le plan était admirable sur le papier : d’une part une diversion dans les Highlands (3 000 hommes sous les ordres de Earl Marischal Keith) et d’autre part un corps expéditionnaire de 10 000 hommes, sous les ordres de Maurice de Saxe, qui venait de recevoir son bâton de maréchal ; la mission qui lui était assignée était d’opérer un débarquement dans le Kent, afin de menacer Londres. Pendant ce temps l’amiral de Roquefeuil quitterait Brest avec une escadre de 22 vaisseaux et attirerait la Navy au large de l’île de Wight, pour permettre au comte de Saxe de traverser tranquillement le Pas-de-Calais.

Jean Meyer et Jean Béranger, La France dans le monde au XVIIIe siècle, pp. 177-178

* * *

26 janvier 1744. Une importante escadre sous le commandement du comte de Roquefeuil (un vétéran de la Marine de Louis XIV) vient d’appareiller de Brest et fait voile vers la Manche. La trouvant vide, et croyant la flotte britannique chargée de la défense de la Manche abritée à Portsmouth (c’est-à-dire sur ses arrières), Roquefeuil fait informer Dunkerque et le comte de Saxe que la voie est libre et ordonne le déclenchement de l’opération, tandis que lui-même et son escadre continuent de s’avancer vers le détroit du Pas-de-Calais. C’est là que la « malédiction qui semble peser sur toutes les tentatives de débarquement en Angleterre » (dixit l’historien de la marine française André Zysberg) entre en jeu…

Arrivé à hauteur des Downs (la pointe sud-est de l’Angleterre), Roquefeuil tombe nez à nez avec la flotte anglaise de l’amiral Norris – qui n’était donc pas à Portsmouth ! Face à cette escadre bien supérieure en nombre que la sienne, Roquefeuil fait demi-tour, seulement pour être pris dans une violente tempête comme l’hiver atlantique sait les organiser. Si le déchainement des forces naturelles sauve à vrai dire l’escadre de Roquefeuil en empêchant Norris de lui donner la poursuite, elle règle définitivement son compte à la flotte de transports partie entretemps de Dunkerque (dont 12 navires sont coulés corps et biens et des dizaines d’autres jetés aux rivages par la violence des éléments). Moins de trois semaines après son déclenchement, le désastre est consommé : le corps expéditionnaire et sa flotte de transports sont décimés, tandis que l’escadre de Roquefeuil est rentrée à Brest sévèrement bousculée par les tempêtes, et sans son commandant… (Roquefeuil est en effet mort subitement en mer sur son navire-amiral le 29 février, dans le dur des événements…) Face à cette catastrophe navale, et à défaut de plan alternatif, le gouvernement français décide l’annulation générale du projet d’invasion, et le maréchal de Saxe et ses troupes sont redéployés au Pays-Bas, où ils mèneront d’ailleurs comme nous l’avons vu une campagne terrestre brillante…

Le Royaume-Uni se défend tout seul. Son isolement le met à l’abri des surprises et des invasions. Les changements qui bouleversent le continent, guerres, conquêtes, révolutions, ne l’affectent pas de façon directe. Il n’en subit que le contrecoup lointain, amorti et retardé. L’ennemi n’est pas aux portes de Londres comme il est aux portes de Paris. Depuis le XIe siècle, toutes les tentatives de débarquement ont mal tourné. Des corsaires, des brûlots, des navires légers armés à la hâte suffirent pour arrêter la redoutable Armada de Philippe II. Les vents, les vagues et les orages firent le reste. À l’abri derrière ses escadres, l’Angleterre peut, s’il lui plaît, ignorer le continent. Que la France se trompe sur ses intérêts, relâche son effort, désarme, se laisse égarer par des rêves chimériques, elle met aussitôt son existence en danger. Sûre de l’intégrité de son territoire, retranchée dans ses îles inviolables, l’Angleterre ne ressent de ses fautes qu’une diminution temporaire de puissance. Elle joue son prestige où la France risque sa vie. Une défaite qui tuerait la France ne la condamne qu’au recueillement.

Pierre Gaxotte, Le siècle de Louis XV, pp. 193-194

Aussi vite réenvisagé que réenterré en 1745 suite aux victoires initiales de Charles Édouard Stuart en Écosse, le projet de débarquement en Angleterre retournera dans les cartons jusqu’à la fin de la guerre de Succession d’Autriche. Pour n’en être que mieux ressorti dès 1759 par un certain duc de Choiseul, alors empêtré dans une nouvelle guerre avec la Grande-Bretagne, celle-là d’encore plus grande envergure (notre fameuse guerre de Sept Ans). Mais ceci est une autre histoire à laquelle nous arriverons dans un prochain chapitre… 😉


1744-1748 : guerre maritime sur tous les fronts

Sur mer, les escadres anglaises gardèrent partout l’avantage, mais elles ne surent pas en tirer profit. Mal réparties, commandées par des amiraux politiciens, elles se bornèrent à des opérations mal conçues et sans importance véritable. Elles ne parvinrent pas à empêcher le ravitaillement des Antilles, nids de corsaires ; une tentative de débarquement au nord de Lorient échoua et lorsqu’on fit le bilan des pertes, on s’aperçut que si les Anglais avaient capturé environ trois mille cinq cents navires marchands français et espagnols, nous leur en avions enlevé plus de trois mille.

Pierre Gaxotte, Le Siècle de Louis XV, p. 219

Au début de l’année 1744, la France se retrouve donc dans une situation ambivalente. Conséquence des errements stratégiques des fortes voix de son élite dirigeante, elle se retrouve engagée à plein dans une violente guerre continentale où elle n’a peu ou prou rien à gagner, tout en sachant pertinemment que ses intérêts à défendre du moment sont ailleurs (en l’occurrence : dans le monde colonial et relatifs à son commerce maritime). À Versailles, tous les stratèges un tant soit peu avisés le savent bien : l’ennemi et la menace première pour les intérêts français dans le monde, ce n’est pas l’Autriche, mais l’Angleterre. Cela reste vrai même en matière de sécurité du territoire national, puisque c’est bien Londres, et non Vienne, qui constitue structurellement depuis 1688 la tête, le nœud et la banque des coalitions européennes fomentées contre la France en chaque temps de conflit. Cela, malgré ses penchants pacifiques, Louis XV a bien fini par le comprendre, c’est pourquoi il s’est résigné à accepter le projet d’un débarquement en Angleterre afin de neutraliser temporairement les capacités du voisin d’outre-Manche – dont seuls les naïfs ou les traîtres peuvent encore se bercer de l’illusion que ce dernier laissera pacifiquement la France poursuivre sa remarquable expansion outremer…

Malheureusement, la tentative de prendre les devants d’une guerre inéluctable a échoué. Comme nous l’avons vu plus haut, l’escadre de dix-neuf vaisseaux ayant quitté le Ponant en février pour protéger le débarquement du prétendant Stuart accompagnée d’une forte armée a du rebrousser chemin devant Calais à cause du mauvais temps, d’une force britannique très supérieure (vingt-cinq vaisseaux) et de la mort de son chef. Le coup de poker a échoué, et il va donc devoir falloir la jouer à la régulière. Or l’adversaire dispose sur ce plan (naval donc) de forces bien supérieures, qu’il utilise déjà à plein. Grâce à son immense flotte, la Grande-Bretagne est, en ce premier acte de la guerre de Succession d’Autriche, capable conjointement d’affronter les Espagnols dans les Caraïbes, de contrôler la Manche (et ce faisant d’y faire échouer toute tentative de débarquement français en Grande-Bretagne), de faire échec au blocus de Gibraltar, d’harceler les convois franco-espagnols acheminant troupes et matériels entre les péninsules ibérique et italienne, tout en faisant le blocus (illégal) de Toulon. Et il lui reste encore de la réserve. C’est de ce dernier endroit, cependant, peu avant qu’intervienne (enfin) la déclaration de guerre officielle entre la France et l’Angleterre, que va venir, contre toutes attentes, la surprise…

La levée du blocus de Toulon et la guerre en Méditerranée

La suite de cet article est réservée aux abonnés !

 

Abonnez-vous (ou prenez une offre Découverte à 5 € sans abonnement) pour accéder à l'intégralité des contenus du site et soutenir mon travail ! 🙏😉

 

Histoires itinérantes, ce sont des heures de lectures passionnantes et enrichissantes qui vous attendent autour de grands thèmes historiques ! 🌎🏛

 

==>  Voir les OFFRES d'ABONNEMENT 

 

Déjà abonné ? Connectez-vous ci-dessous !

* * *

… Fin du chapitre IV …

Bibliographie et portail documentaire

Vous trouverez ci-dessous le détail de la bibliographie ainsi que de la vidéographie qui ont servi de matière à la rédaction de cette série « préliminaire » (oui, je sais, on a vu plus court en matière de préliminaires… 😉). Je précise bien sûr que je n’ai pas (encore) eu la possibilité de lire l’intégralité des ouvrages mentionnés. J’ai néanmoins jugé intéressant de les faire figurer ici, car ils constituent des ouvrages de référence sur les « objets historiques » – thématiques comme transversaux – qui nous ont occupés et qui vont continuer de le faire dans le cadre de cette série autour de la guerre de Sept Ans (et donc des idées et suggestions de lectures pour celles et ceux qui souhaiteraient approfondir les sujets explorés ici !).

Articles et ouvrages papier (liste non-exhaustive) :

Sur le contexte géopolitique et les relations internationales au XVIIIe siècle :

  • Jean MEYER et Jean BÉRANGER, La France dans le monde au XVIIIe siècle, Paris, éditions Sedes, coll. « Regards sur l’histoire », 1993, 380 p.
  • François TERNAT, Partager le monde : Rivalités impériales franco-britanniques (1748-1756), Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2015, 584 p.
  • Lucien BÉLY, Les relations internationales en Europe : XVIIe – XVIIIe siècle, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Thémis », 1992, 731 p.
  • Éric SCHNAKENBOURG, Le monde atlantique – Un espace en mouvement. XVIe-XVIIIe siècle, éditions Armand Collin, 2021, 384 p.
  • Pierre GAXOTTE, Le Siècle de Louis XV, éditions Fayard, 1933, 486 p.
  • Michel ANTOINE, Louis XV, Paris, éditions Hachette, coll. « collection Pluriel » (no 8571), 1993, 17e éd. (1re éd. 1989), 1053 p.
  • Jean-Christian PETITFILS, Louis XV, éditions Perrin, 2014, 900 p.
  • Fernand BRAUDEL, Grammaire des civilisations, Flammarion, 1963, 752 p.
  • André ZYSBERG, Nouvelle Histoire de la France moderne, tome 5 : La monarchie des Lumières, 1715-1786, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points Histoire », 2002, 552 p.
  • Guillaume MAZEAU, « Glorieuse Révolution » anglaise : au XVIIe siècle, un modèle de modernité politique, article originellement paru dans le n° de décembre 2022 du magazine Histoire & Civilisations
  • Guillaume MAZEAU, La dette de l’État, poison de l’Ancien Régime, article originellement paru dans le n° de février 2021 du magazine Histoire & Civilisations
  • Cecil ROTH, Histoire des Marranes, éditions Liana Levi, 2002, 341 p.
  • Jacques ATTALI, Les Juifs, le monde et l’argent : histoire économique du peuple juif, éditions Fayard, 2002, 638 p.
  • Histoire des Condés
  • Des dizaines et des dizaines d’articles Wikipédia qu’il serait trop long et fastidieux d’énumérer intégralement ici (voir les liens hypertextes disséminés au fil des articles)

Sur la guerre de Sept Ans et plus globalement l’histoire coloniale et maritime de la France du XVIIIe siècle :

  • Michel VERGÉ-FRANCESCHI, La Marine française au XVIIIe siècle : guerres, administration, exploration, Paris, SEDES, coll. « Regards sur l’histoire », 1996, 451 p.
  • Jean MEYER et Martine ACERRA, Histoire de la marine française : des origines à nos jours, Rennes, Ouest-France, 1994, 427 p.
  • Edmond DZIEMBOWSKI, La guerre de Sept Ans (1756-1763), éditions Perrin, 2015, 700 p.
  • Olivier CHALINE, La mer et la France : Quand les Bourbons voulaient dominer les océans, Paris, Flammarion, coll. « Au fil de l’histoire », 2016, 560 p.
  • Martine ACERRA et André ZYSBERG, L’essor des marines de guerre européennes : 1680-1790, Paris, éditions SEDES, coll. « Regards sur l’histoire », 1997, 298 p.
  • Patrick VILLIERS, Jean-Pierre DUTEIL et Robert MUCHEMBELD (dir.), L’Europe, la mer et les colonies : XVIIe – XVIIIe siècle, Paris, Hachette supérieur, coll. « Carré histoire », 1997, 255 p.
  • Patrick VILLIERS, Des vaisseaux et des hommes : La marine de Louis XV et de Louis XVI, Paris, Fayard, coll. « Histoire », 2021, 416 p.
  • Étienne TAILLEMITE et Maurice DUPONT, Les Guerres navales françaises : du Moyen Âge à la guerre du Golfe, Paris, SPM, coll. « Kronos », 1995, 392 p.
  • Étienne TAILLEMITE, Dictionnaire des marins français, Paris, Tallandier, coll. « Dictionnaires », 2002, 537 p.
  • Michel VERGÉ-FRANCESCHI (dir.), Dictionnaire d’Histoire maritime, éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2002, 1508 p.
  • Cyrille P. COUTANSAIS, L’empire des mers – Atlas historique de la France maritime, éditions du CNRS, 2015, 336 p.
  • Rémi MONAQUE, Une histoire de la marine de guerre française, Paris, éditions Perrin, 2016, 526 p.
  • Guy LE MOING, Les 600 plus grandes batailles navales de l’histoire, Rennes, Marines éditions, 2011, 619 p.
  • H.-E. JENKINS (trad. de l’anglais), Histoire de la marine française : des origines à nos jours, Paris, Albin Michel, 1977, 428 p.
  • Frank McLYNN, 1759 : The Year Britain Became Master of the World, Pimlico, 2005
  • James PRITCHARD, Louis XV’s Navy, 1748-1762 : A Study of Organization and Administration, Kingston / Montréal, McGill-Queen’s University Press, 1987, XIV-285 p.
  • Jonathan R. DULL, The French Navy and the Seven Years’ War, Lincoln, University of Nebraska Press, coll. « France Overseas », 2005, XIII-445 p.
  • Joseph ALLEN, Battles of the British navy, vol. 1, Londres, Henry G. Bohn, 1852, 604 p. 
  • Jeremy BLAKE, Britain as a Military Power : 1688-1815, Routledge, 1er février 1999, 332 p.
  • Norman LONGMATE, Island Fortress : The Defence of Great Britain, 1603–1945, Harper Collins, 1993
  • N.A.M. RODGER, Command of the Ocean : A Naval History of Britain, 1649–1815, Penguin Books, 2006
  • Brendan SIMMS, Three Victories and a Defeat : The Rise and Fall of the First British Empire, Penguin Books, 2008
  • « Dupleix (1697-1763), bâtisseur d’Empire », article publié en 2021 sur le site Hérodote.net
  • François-Guillaume LORRAIN, « Joseph Dupleix, l’homme qui rêva des Indes françaises », article publié en décembre 2023 sur le site web du Magazine Le Point
  • BD Bataille des Cardinaux
  • À nouveau : des dizaines et des dizaines d’excellents articles Wikipédia qu’il serait trop long et fastidieux d’énumérer ici (voir les liens hypertextes disséminés au fil des articles)

Documentaires filmés, contenus vidéos et émissions radiophoniques (liste non-exhaustive) :

  • « Qui a (vraiment) découvert l’Amérique ? », websérie de 4 vidéos réalisée par Damien de la chaîne Youtube EnQuête d’Histoire
  • « Comment le Portugal est-il devenu une grande puissance ? », vidéo réalisée par la chaîne Youtube L’Instant Histoire
  • « Quels furent les moteurs de l’exploration maritime ? », vidéo réalisée par la chaîne Youtube Questions d’Histoire
  • « Le monde atlantique : un espace en mouvement. XVeXVIIIe siècle. », série de 3 émissions réalisée par Storia Voce (le podcast du magazine Histoire & Civilisations) sur la base de l’ouvrage éponyme d’Éric Schakenbourg
  • « L’ouverture Atlantique : fortunes de mers et sirènes coloniales », émission du podcast Storia Voce
  • « Comment les Pays-Bas sont-ils devenus une grande puissance ? », vidéo réalisée par la chaîne Youtube Épisodes d’Histoire
  • « Comment la Superpuissance Hollandaise s’est effondrée ? », vidéo d’Épisodes d’Histoire
  • « Amsterdam, Londres et New-York : trois villes à la conquête du monde », documentaire notamment produit par Arte France et disponible sur Youtube (ici)
  • « La fin tragique du Grand Siècle – La Guerre de Succession d’Espagne », émission du podcast Storia Voce
  • « Comment la superpuissance espagnole a été écrasée ? », vidéo d’Épisodes d’Histoire
  • « Comment la Glorieuse Révolution a-t-elle favorisé l’essor économique de l’Angleterre ? », vidéo de Questions d’Histoire
  • « The Congress of Vienna (Part 1) (1814) », vidéo réalisée par la brillante chaîne Youtube Historia Civilis
  • « La Guerre de Trente Ans : La 1ère der des ders ? (1618-1648) », vidéo réalisée par la (toute aussi brillante) chaîne Youtube Sur le champ
  • « Comment le Royaume de Prusse est-il né ? », vidéo d’Épisodes d’Histoire
  • « Comment la France a écrasé la plus puissante dynastie d’Europe ? », vidéo d’Épisodes d’Histoire
  • « En quoi la première guerre de l’opium est-elle mercantile ? », vidéo de Questions d’Histoire
  • « Comment l’Angleterre a-t-elle dominé les océans ? », vidéo réalisée par la chaîne Youtube Questions d’Histoire

Pour les impatient(e)s, vous avez déjà la possibilité de découvrir ce qui constituera le principal choc de cette guerre de Sept Ans : son théâtre nord-américain. Dans le cadre de ce quatrième et dernier chapitre de ma grande série sur l’histoire de la Nouvelle-France, je vous raconte en effet que ce les Québécois nomment sous le titre fort évocateur la « guerre de la Conquête », guerre qui se soldera par la perte pour la France de la quasi-intégralité de son empire américain…

Au terme de cette gigantesque « introduction » déployée sur quatre chapitres, nous avons achevé de brosser le tableau d’ensemble et de poser les différents jalons qui constituent le grand arrière-plan contextuel et géopolitique de notre fameuse guerre de Sept Ans – qui est désormais toute proche et qui gronde maintenant à l’horizon. C’est avec elle que nous aurons (enfin) rendez-vous dans le cadre de la nouvelle série qui s’ouvre, et dont nous attacherons à en saisir en profondeur la monumentale portée dans l’Histoire moderne et dans la cristallisation du monde tel que nous le connaissons aujourd’hui.

Avant cela – et en guise d’ultime étape –, nous nous arrêterons un dernier instant dans le cadre d’un épisode “Hors-Série” sur les grandes caractéristiques de la France et de la Grande-Bretagne du milieu du XVIIIe siècle. Une sorte de photographie et de portraits croisés de nos deux rivaux juste avant le grand choc qui s’avèrera fort utile à mieux comprendre tout ce qui différencie nos deux grandes puissances sur les plans tant politiques qu’économiques (ce sont à vrai dire deux modèles totalement distincts qui s’opposent !) et à ainsi mieux saisir les ingrédients du désastre côté français, et du triomphe côté britannique… À bientôt !


Si vous avez aimé cet article et souhaitez que je puisse continuer à en produire d’autres de ce type, toujours plus riches et documentés, n’hésitez pas à soutenir mon travail en vous abonnant et/ou en me soutenant via la plateforme de don d’Histoire Itinérante (les dons récurrents supérieurs à 2 € générant automatiquement un accès abonné au site !).

Merci, chaque soutien, chaque petit euro, me permet de vivre et est très précieux et déterminant pour l’avenir du site ! 🙏🙂

Soutenez Histoire Itinérante sur Tipeee

Laisser un commentaire